L’assertivité ou comment dire les choses 3/3
- 17 octobre 2017
- Posté par : Gabriel Jarrosson
- Catégorie : Nos thèmes de formation
Interview de Geneviève Schmit :
Comment l’emprise perverse se met-elle en place ?
Assertivité et communication non-violentes peuvent fournir quelques outils efficaces et désinhiber l’intelligence émotionnelle et relationnelle, étouffée par une l’oppression délirante d’un pervers narcissique.
Pour parvenir à mettre en place l’emprise perverse, le manipulateur va déployer des efforts considérables et se livrer à toutes sortes de mises en scène afin de vaincre les résistances de l’autre. Il s’agit de stratégies bien rodées, certaines instinctives, d’autres plus réfléchies.
Voici les étapes qu’enchaîne le manipulateur. Tout d’abord, il attire sa proie pour nouer un contact. Ensuite il la valorise, n’hésitant pas à la flatter puisque « tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ». Ensuite arrive une phase plus active, celle du soutien. Qui résisterait à l’arrivée providentielle d’un « sauveur » aux petits soins. Il devine le rêve que sa proie entretient dans le secret de son esprit romanesque et il lui vend ce rêve. Pour paralyser l’esprit critique, il crée une situation étourdissante où il y a « trop de tout ». Ensuite, il utilise une méthode connue en théorie de la décision pour forcer les choses, il crée l’urgence, contraint à aller très vite dans l’évolution de la relation. Faire prendre un décision vite est la base de la manipulation. Sans cesse, il plonge sa proie dans la confusion mentale en soufflant le chaud et le froid. Par exemple, il simule la jalousie pour faire croire qu’il peut perdre alors qu’il n’en est rien. Il s’agit de créer du manque et de l’insécurité.
Ce genre de relation a été observé un nombre incalculable de fois. C’est un modèle qui connaît peu de variante. L’objectif du manipulateur est de s’approprier sa victime, corps et âme, jusqu’à la transformer en pantin désarticulé. En vampirisant sa proie, le pervers narcissique soigne son propre narcissisme. Avec une certaine efficacité d’ailleurs.
Le scénario est assez bien rodé. Un pervers narcissique a un comportement toxique avec tout le monde, mais sa manière de procéder diffère d’une victime à une autre puisqu’il tient compte des différents paramètres de la relation et adapte son comportement à la personne qu’il a en face de lui ainsi qu’à l’enjeu du moment et le plaisir ressenti.
Le manipulateur pervers commence par des démarches en apparence altruistes, bienveillantes et valorisantes. Il fait un cinéma digne de Hollywood tout en admirant son propre jeu. Calquant son rôle sur l’attente romanesque de sa proie, il saura se rendre irrésistible à ses yeux. Il va prendre toute la place dans la vie de sa proie, laquelle reste figée, éblouie par les phares de son ego grandiose.
Le pervers narcissique manie avec talent l’art du « double lien » (que l’on appelle aussi « double contrainte » ou « injonctions paradoxales »), face auquel il est impossible de se décider. Il s’agit de deux messages contradictoires qui sont simultanément émis : par exemple, l’injonction « Soyez spontané ! » ou « Sois un grand mon petit » ou le redoutable « Mais tu as raison ma chérie, écoute ton copain, porte plainte contre moi et surtout… n’oublie pas d’acheter des fleurs pour mon enterrement. » Ces injonctions paradoxales contiennent deux demandes qui s’opposent, l’une interdisant la réalisation de l’autre et vice et versa, ce qui bien sûr rend la situation insoluble.
Le double lien est typique du manipulateur narcissique qui amène sa victime à douter d’elle-même, de ce qu’elle a entendu ou compris, et la pousse progressivement dans une confusion dont il tirera le plus grand profit.
Le renversement des accusations, de la charge de la preuve en quelque sorte, constitue une tactique perverse bien rodée : c’est la signature du vampire. Le « vertueux père incestueux », membre d’honneur d’une association de pères en détresse, reportera systématiquement la responsabilité de son acte criminel sur sa victime, prétendument vicieuse, séductrice, perverse « polymorphe », ou rejettera la faute sur l’alcool, le travail, la fatigue. Le bourreau s’arrange pour ne jamais être pris la main dans le sac et fait passer l’autre pour responsable de ses propres fautes ou pensées perverses. Bref, ce n’est jamais de sa faute !
Ces techniques instinctives ont pour objectif de réduire à néant la capacité de la proie à prendre le recul nécessaire à une réflexion salvatrice. Toujours en lutte pour survivre, la victime du pervers narcissique ne peut vivre.
Les cinq étapes de la mise sous emprise perverse :
- Attraction
- Captation
- Renforcement
- Verrouillage
- Mort ou vie
L’assertivité : conversation avec un pervers narcissique
Fondamentale dans le cadre d’une communication non violente, l’assertivité peut vous aider à supporter (peut-être même à contrer) les discours manipulateurs, confus et agressifs du pervers narcissique.
Il est difficile, voire impossible, de gérer un pervers narcissique. Pourtant, lui opposer un comportement assertif peut le déstabiliser. Le pervers narcissique utilise le langage pour amener sa victime dans une confusion telle qu’elle ne peut plus discerner le sens de la « conversation » et se retrouve très vite dans une sorte de transe hypnotique où elle n’a plus la maîtrise de ses émotions et de ses pensées.
Perdant le contrôle et ressentant un grand danger, la victime se trouve dans un état légitime de réaction protectrice qui se transforme presque immédiatement en fuite ou en agression et qui sera alors retournée contre elle puis instrumentalisée par le provocateur.
Face à un pervers narcissique, l’assertivité semble être la seule alternative. Il s’agit de se positionner sans renoncer à son amour-propre, d’ouvrir une brèche dans laquelle exprimer son émotion.
Retrouvez Geneviève Schmit sur soutien-psy-en-ligne.fr
Ce qui rapproche et ce qui distingue « assertivité » et « confiance en soi ».
(Extrait rédigé par Frédéric LEVY)
La confiance en soi favorise l’assertivité sans pour autant être une notion similaire. La confiance en soi est un état, l’assertivité un comportement relationnel, un comportement de communication.
On peut faire preuve de confiance en soi sans pour autant être assertif ! Une personne nous double dans la file d’attente. On n’a pas l’intention de se laisser faire. Haut et fort, on interpelle le resquilleur et on lui dit sa façon de penser. On n’hésite pas à hausser le ton. Il faut une certaine confiance en soi pour oser être actif dans cette situation. On pourrait tout à fait, par passivité, se taire. Mais si on agit avec agressivité, on se sera bien appuyé sur sa confiance en soi, sans pour autant faire preuve d’assertivité.
Oser prendre la parole devant un groupe, alors que rien ne nous y contraint nécessite une certaine dose de confiance en soi. Mais que va-t-on dire ? Va-t-on aller dans le sens de l’avis général ou osera-t-on s’y opposer ? Je peux avoir suffisamment de confiance pour prendre la parole mais pas assez d’assertivité pour dire vraiment ce que je pense.
Ce qui rapproche l’assertivité et la confiance en soi, ce sont les freins similaires qui peuvent, dans un cas comme dans l’autre, nous empêcher d’y arriver. Ces freins, ce sont souvent des peurs. Peur de ne pas être à la hauteur, peur du jugement, peur de décevoir, peur de ne pas y arriver… La confiance en soi est souvent conditionnée par le regard de l’autre. Chanter seul, sous la douche, ne nécessite pas de confiance en soi particulière. Chanter la même chanson devant trois cent personnes va s’avérer plus périlleux. La confiance en soi, c’est avant tout savoir apprivoiser la peur du regard de l’Autre.
Article rédigé par Bruno Jarrosson & Gabriel Jarrosson